Bahônon tremblait comme sous l’effet ardent d’une froidure arctique. À qui pourrait-elle relater son malheur ? Elle commettait l’adultère ! Elle mettait un poignard dans le dos de son homme qui était déjà à genou, assommé par le gourdin impitoyable du destin ! Ni elle, ni son bourreau n’étaient sans savoir que dans les traditions africaines, une femme qui montre sa nudité à un autre homme affaiblit spirituellement son homme.
Elle le tue, à petit feu ! Bahônon, ce prénom qui signifie belle femme en pays Bété, connaissait pour la première fois le goût répugnant du dégoût, de la laideur. Elle sentait des cornes lui sortir du front, et des écailles sur tout le corps. Elle ne serait plus jamais la même. Elle le savait. Une femme a-t-elle le droit de s’exposer sur l’autel d’un tel sacrifice pour venir en aide à son mari ? Mais aussi, a-t-elle le droit de laisser couler son époux dans le puits de la pauvreté et donc de l’indignité ?